L'arbre ne peut être blanc

Publié le par ArbreBlanc

Il était une fois ...

Si je parcours à nouveau les articles du blog, le point de départ est la détection d'un risque : celui que l'humain soit à la périphérie du fonctionnement de l'économie, et de l'entreprise privée en particulier. 


Je flaire l'antinomie entre le collectif de la société, à travers l'Etat, qui tire sa subsistance de l'économie, mais risque de perdre pied face à des économies mondialisées, face auxquelles il n'existe pas d'Etat mondial.


A ce point, je commet deux approximations, a posteriori :

  • je pense que cette antinomie est grave, et va s'aggraver, au détriment de l'Etat, et mettre l'humain en danger, 

  • et d'autre part je pense qu'il est possible de mettre en oeuvre une approche fondée sur une approche philosophique, par la raison, le rationnel, qui dépasse ce problème. La raison triomphant des approximations humaines ... notamment l'inégalité sociale.

L'humain et l'économie

Je sous-estime alors que les acteurs économiques sont des membres de la société, et que déjà ce double attachement est un lien générateur d'équilibre. Partout sur la planète ... les dirigeants d'entreprise sont conscients du coût humain de leurs actions, et également que leur entité, l'entreprise, est un organisme immergé dans la société qui les entoure, qui ne peut vivre sans celle-ci.


L'entreprise a néanmoins une originalité - parmi d'autres : elle est un moteur créateur de richesse, obligatoirement performant. L'entreprise est une entité optimisée pour le développement de la richesse, et il faut l'approcher avec cette considération en tête. D'autre part, la richesse créée ne profite pas simplement à quelques uns mais à la société dans son ensemble. L'entreprise ne réserve pas ses fruits à ses actionnaires ou ses dirigeants. L'Etat prélève, en France, 40% de cette richesse (le PIB) pour la redistribuer.


Il faut connaître l'entreprise pour pouvoir la critiquer, et non pas la considérer dans un amalgame idéologique douteux.


La possible dérive vers l'enrichissement ne découle pas de l'économie. Il découle des comportements individuels d'une part et de la prééminence d'un ensemble de dirigeants dans la société d'autre part. 


Sur le premier point, ceci renvoie directement à l'individualisation de nos comportements, qui est une donnée également indispensable pour appréhender la société occidentale. Sans liberté des personnes l'individu n'existe pas. C'est notre attachement à la valeur Liberté qui une donnée fondamentale.


Sur le second point, croire qu'une égalité parfaite des membres d'une société est possible concrètement est un leurre. En lisant Raymond Aron par exemple, on comprend très vite que tout groupe a besoin de dirigeants, qui sont systématiquement en position privilégiée pour recueillir les fruits du fonctionnement du groupe. Je considère cet axiome comme une donnée sociale, même s'il peut y avoir des exceptions isolées, qui resteront moins performantes que le modèle dirigé. Ainsi les entités auto-gérée seront moins performantes que les entités dirigées et ne sont pas à privilégier si on souhaite continuer à nous développer ...  


Raymond Aron explique également très bien, que dans la société soviétique le groupe des dirigeants s'est promptement reconstitué ... au profit d'une direction totalitaire.


En incorporant le paradigme libéral, je me suis alors rendu compte à quel point il manque, dans l'action politique, dans l'appréhension intellectuelle, une dimension sociologique qui est en réalité fondamentale.


Ce paradigme veut qu'au lieu d'un équilibre établi et immuable, maintenu par le biais de mécanismes extérieurs figés (morale, loi), certaines situations soient le fruit de la réalisation d'un équilibre par interaction contradictoire entre deux ou plusieurs points de vue, partis, etc, libres de s'affronter dans le cadre social. C'est ainsi que nos sociétés parviennent à résoudre l'équation visant à la fois à préserver la diversité, la différence, et le vivre ensemble. Qu'elles permettent qu'elles contiennent des dirigeants et des dirigés. Des partisans de gauche et des partisans de droite. Des individus et des collectifs. De la responsabilité et de la conviction. Entre les syndicats et les gouvernements. Entre le parlement et l'exécutif. Etc ...

Excès rationnels

J'ai également commis une erreur grossière, au sens sociologique, en croyant que la raison est prééminente, en particulier socialement. Or la lecture de Raymond Aron prouve le contraire. Les mouvements sociologiques contemporains ont pour moteurs des éléments collectifs et des comportements individuels. La raison sous-tend une partie de la population, mais pas l'ensemble. Y compris pour les politiciens qui "guident" la population. Et la raison ne sous-tendra jamais l'ensemble de la population, mais seulement une élite particulière, celle des intellectuels.


La raison s'est répandue avec la liberté individuelle. Je crois qu'elle y puise sa raison d'être. Elle est un ingrédient sociologique indéniable. Mais elle n'est pas destinée, PAR NATURE, à être LA société.

Un peu de lumière

Et tout s'éclaire alors.


Jamais, au grand jamais, l'idéal égalitaire et rationnel ne pourra s'établir. Ce n'est qu'un point de vue collectif, altruiste. Il rencontrera toujours face à lui la contradiction individuelle. Et perpétuellement c'est un compromis, parfois difficile, qui s'établira.


Jamais, au grand jamais, le monde politique ne parviendra à convertir ses promesses en réalité. Tout juste parviendra-t-il à nous faire rêver. Les politiques existent parce que nous croyions aux rêves, aux idéaux. Ils sont des illusionnistes chargés de les faire naître. Chargés de susciter la déconnexion du réel, une drogue pour supporter notre condition concrète.


Tout le sens d'un engagement, c'est de venir grossir numériquement une faction ou l'autre. Si les factions existent, si les pousseurs de cris se manifestent déjà, toute parole supplémentaire est inutile. Voire génératrice d'excès, de saturation, d'hystérie. Hystérie pseudo-rationnelle ....


L'individu, ses désirs, ses rancoeurs, sont mélées à tout engagement. Les déceptions personnelles passées, les espoirs, les croyances sont un moteur non négligeable de l'action politique.


L'inspiration marxiste, carcan intellectuel obsolète, est une erreur, une imposture dans le monde actuel. Tous ses utilisateurs politiques sont des manipulateurs mentaux, des illusionnistes s'appuyant sur la résidu de l'onde de choc, du fantasme qu'il a créé, il y a presque maintenant un siècle.


La clé est sociologique, elle n'est ni intellectuelle ni politique.

S'engager socialement : combat ou équilibre

Au final, ma préférence va non pas à nourrir les contradictions, déjà largement alimentées. Mon fantasme n'est pas le combat (social). C'est l'harmonie. Je préfère donc contribuer concrètement à un équilibre utile.


Celui de l'entreprise, issue d'une expérience de terrain très longue, dont l'objectif est de permettre la poursuite de notre développement collectif, tout en fournissant un cadre d'épanouissement personnel. En étant attentif à la préservation d'un équilibre entre développement de l'humain et création de valeur.

Conclusion : dernier article

Le blanc est une couleur illusoire pour un arbre, censé être enraciné dans le concret. La pureté n'est pas possible en politique. La pureté peut faire des ravages dans la réalité, dans la vie.


L'arbre ne peut pas être blanc.


Cet article est donc le dernier de ce blog. Peut-être y aura-t-il un autre blog.

Publié dans Politique

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